Intervention du 31 mars 2007 à la rencontre organisée par le FMVJ, l’AMF, l’ATMF, l’APADAM en Hommage à Moui Fama, résistante. Dans ses convictions les plus profondes, avec l’enthousiasme nécessaire, Moui Fama a bravé les interdits. Dans un pays où la domination masculine, malgré les acquis, reste préoccupante, à une période historique où les pères et les frères dominaient leurs épouses, sœurs et mères, la figure de Moui Fama, son combat reste toujours d’actualité et rejoint celui de nombreuses femmes au Maroc. Ce reportage d’une femme qui a habité sa djellaba pour se battre contre toutes les servitudes familiales et sociétales est un exemple de la Mémoire historique et politique d’un peuple qui s’écrit aussi par des femmes. Elle nous a quittés le 20 mars 2004.

La journée internationale des femmes fêtaient ses 30 ans ce 8 Mars et c’est l’occasion en cette fin de mois de rendre hommage et ne pas oublier toutes celles qui dans le monde s’engagent pour défendre la liberté d’expression, la Justice et le droit.
Je pense à Rawda Oudeh, mère courage de Jérusalem et à toutes ces femmes résistantes en Palestine, à ces femmes qui sont actuellement en prison car elles ont osé résister au non-droit : Saidia Ahmed (Erythrée), Serkalem Fassil (Ethiopie), Rabiaa Abdoul Wahab (Irak), et bien d’autres.
En ce quatrième et douloureux anniversaire de l’invasion américaine en Irak, mes pensées iront à ces trois jeunes irakiennes, Wacen, Zaineb et Lika : 31, 25 et 26 ans, condamnées à mort par la cour suprême irakienne pour leur complicité dans le meurtre de policiers collaborateurs et pour avoir participé à des actes de résistance qualifiés de terroristes.
Prisonnières de guerre, leurs droits qui auraient dû être protégées par les conventions de Genève sont bafoués.
Quand la Mémoire d’un peuple s’écrit par ses femmes.
Dans notre pays, des femmes ont bravé tous les interdits par des sacrifices divers.
Un petit rappel à l’occasion de ce 42ème anniversaire des évènements de Mars 1965 :
Au début du mois de mars 1965, le ministre de l’Éducation, Youssef Belabès, publie une circulaire interdisant aux élèves âgés de plus de 16 ans de redoubler « le brevet » (l’équivalent de la troisième).
Dès le 22 mars, les élèves se rassemblent sur le terrain de foot du lycée Mohammed-V pour protester contre la circulaire du ministre et organiser une marche jusqu’au siège de la délégation de l’enseignement… Ils voulaient attirer l’attention des autorités sur ce qu’ils considèrent comme une atteinte à un « droit national » inaliénable : le droit à l’enseignement public.
Mais, lorsque les élèves atteignent le Centre culturel français, au centre de Casablanca, les forces de l’ordre les attendent. Une brutale répression les attend et les disperse. Les lycéens, alors, rejoignent les quartiers populaires : les mères, les sans-emploi se solidarisent avec eux pour décider de se rencontrer dès le lendemain sur le même terrain de foot.
Le 23 mars : du lycée Mohammed-V, les manifestants dont, souvent, à leur tête un grand nombre de femmes, se dirigent vers Derb Soltane (quartier populaire et symbole de la classe ouvrière de Casablanca), puis vers Bab Marrakech, un autre quartier populaire dans la vieille ville.
À 15 heures, l’armée reçoit l’ordre de tirer sur les manifestants. Il n’y eut pas de limite à la répression de l’armée, dirigée par Oufkir.
Des milliers de victimes enterrées dans des fosses communes.
En réponse à cette colère, Hassan II, une semaine après ces évènements dira lors de son allocution le 30 Mars 1965 « Il n’y a pas de danger plus grave pour l’Etat que celui de soi-disant intellectuels. Il vaudrait mieux que vous soyez illettrés. »
Ce 23 mars a fait plusieurs morts dont un certain nombre de femmes dont le crime était de croire en la possibilité pour leurs enfants de sortir de l’illettrisme, qui avaient l’espoir que l’éducation contribuerait à aider leurs enfants dans la vie et qui avaient tout sacrifié pour ceci.
On avait touché à leurs enfants….
Mais, ce n’était pas le première fois que les femmes battaient le pavé et réclamaient la liberté. Quand on a touché à leur pays, ce sont elles qui, en 1913 au lendemain de la colonisation, avaient manifesté à Khémisset: c’était la première manifestation contre la colonisation. Elles se sont mobilisées pour arrêter la colonisation à Fès, au Moyen Atlas, à Saghrou, au Sahara et partout ailleurs.
Elles étaient présentes avec les hommes pour les pousser à la limite de la résistance. Leur participation a été déterminante pendant les 3 phases qui ont marqué le combat contre l’occupation : Ma Alaïnine et Elhiba, au Moyen Atlas Moha ou Hammou Zayane avec Itto Zayania et aux côtés de Abdelkrim al-Khattabi dans tout le nord du Maroc. [1]
Comment s’étonner de cet attachement à leur pays quand on sait que la construction du Maroc a été, aussi, l’œuvre de certaines femmes.
- Au IX siècle Fatima Al-Fihria, d’origine tunisienne, offre aux musulmans la première université : l’Université Al-Quaraouiyine, la plus ancienne université du monde, lieu du savoir qui dispensait depuis le Moyen âge un enseignement autant religieux que littéraire et scientifique de haut niveau.
- Au XI siècle, l’empire Almoravide connaîtra Zineb al-Nefzaouia cette grande femme amazighe. Lorsque son mari Abu Bekr la répudie pour contrecarrer le soulèvement au Soudan, il la recommande à Youcef Ben Tachfine en lui disant d’épouser « cette femme de génie ». Elle fut non seulement la conseillère perspicace du maître des Almoravides. Elle l’a considérablement aidé à conquérir la majeure partie du Maghreb et de l’Espagne et à consolider son trône grâce à sa richesse mais aussi sa diplomatie.[2]
- N’oublions pas, au XIII siècle, « notre Jeanne d’Arc » qui, sous les Mérinides, fera la guerre contre les espagnols et les Portugais : « Sayyda Al-Hurra participe à la chute de l’Andalousie. Elle réussit à gouverner tout le nord du Maroc à partir de Tétouan et consolide le trône chancelant des Mérinides en épousant le sultan.
- Au XVIII siècle Khnata Bent Bakkar, originaire du Sahara, première femme ministre sous le règne du Sultan de sinistre mémoire Moulay Ismaïl. Après la mort de ce dernier, elle gouverne le pays pendant un quart de siècle et réussit à le faire sortir d’une situation désastreuse suite à 30 années de crises terribles.
Ce ne sont là que de brefs rappels : l’Histoire de notre pays doit inscrire le rôle des femmes dans son identité. Elle l’inscrira de plus en plus avec l’engagement militant et politique des femmes contre la colonisation d’abord et pour la démocratie, le droit et la liberté après « l’indépendance formelle » de notre pays.
Comme je le rappelais au début c’est dans l’Atlas que les femmes vont se mobliser : Itto Zayania sera la figure de proue au Moyen Atlas avec Mouha ou Hamou Zayani. Dans le Rif auprès d’Abdelkrim Elkhattabi en particulier comme l’atteste ce documentaire sur OUM FAMA, cette résistante et militante pour la liberté, la justice et le droit.
En 1944, le Manifeste de l’Indépendance a été signé par Malika al-Fassi : une nationaliste militante qui était à la tête de la section féminine du Parti de l’Istiqlal depuis sa fondation en 1946. Elle occupera par la suite une place aux côtés de la monarchie.
En 1947, à Salé, l’Ecole Annahda va consolider la participation d’un grand nombre de femmes. Participation militante pour la cause nationale : Fatima Aoud, Aïcha Belyamani, Khadija Hajji… et bien d’autres[3]
La période de la résistance de 1952 à 1955 est jalonnée de témoignages sur les opérations menées par des femmes à Fez, Marrakech, Rabat, Salé, Khémisset et partout ailleurs. Du fait qu’elles pouvaient se déplacer aisément, elles ont pu transporter armes et munitions. Elles ont également joué le rôle de messagers. L’une des plus célèbres est sans conteste Khaddouj Zerktouni, soeur et bras droit du grand résistant Mohamed Zerktouni
Rabiaa Taibi s’inscrit dans les luttes anticoloniales, mais aussi dans les luttes palestiniennes et algériennes après « l’indépendance ». Née à Oujda en 1931, elle a été sensibilisée, en 1944 à l’âge de 13 ans, aux problématiques du colonialisme et du nationalisme : elle assistait aux réunions et transmettait des messages entre différents circuits de résistants. Elle transportait les armes entre Casablanca, Oujda et l’Algérie. Elle dissimulait son identité sous de faux noms mais elle finira par être arrêtée et torturée.
Avec l’ « Indépendance », elle continue ses activités aux côtés d’autres femmes de la région, engagées dans les luttes anticoloniales. Travaillant dans un hôpital à Oujda, elle soignait les militants blessés du Front National de la Libération de l’Algérie. Par ailleurs, elle leur fournissait des armes, leur offrait refuge parmi les membres de sa famille. D’autre part, elle faisait des dons importants pour la cause palestinienne
Touria Chaoui, adhère au parti de l’ISTIQLAL dès l’âge de dix-huit ans ; Cette première femme pilote n’avait pas peur d’exprimer ses idées nationalistes. Elle sera assassinée le 1 mars 1956. Son assassin serait Ahmed Touil, un conservateur: cette militante était selon lui une menace aux valeurs traditionnelles.
Comme elles plusieurs femmes transportent des armes et hébergent les résistants :
Habiba Amor
Laila Masoudi, qui sera nommée en 1956 cadre au Ministère des Affaires Etrangères.
Latifa El Fellous,
Ftima Al Malqiha,
Fatna Belarbi,
Haddaouia,
Les soeurs Laaraichi,
Saâdia Douraidi
Et bien d’autres restées dans l’anonymat.
Elles ont connu comme leurs camarades masculins les vexations, la prison et la torture. Après l’Indépendance formelle beaucoup d’entre elles sont restées humblement dans l’ombre. C’est à cette humilité là que je rends hommage car elle est le signe d’un véritable don de soi …sans contre partie.
Mais le combat des femmes ne s’inscrira pas seulement contre le colonialisme, il s’intensifiera conte le néocolonialisme et l’absolutisme sous toutes ses formes.
Le Maroc contemporain est celui de nombreuses femmes qui, malgré toutes les difficultés à se faire entendre, ont contribué à ce qu’aujourd’hui on inscrive la nécessité de leur rendre hommage et de ne pas les oublier…
Dans le contexte de la montée des tensions entre la monarchie et le Mouvement progressiste, de nombreuses femmes vont militer dans le cadre de l’UNEM le long des années 60-70.
Leur revendication était leur nécessaire participation politique. Aux premières élections municipales et cantonnales après l’indépendance, la participation des femmes étaient plus importantes : 87 et 86% à Rabat et Fes contre 76 et 70% d’hommes ( cf Zakya Daoud).
En 1963, lors des vagues d’arrestation dans les rangs de l’UNFP, Khadija Medkouri sera arrêtée, emprisonnée, torturée. Elle sera acquittée au procès de Mars 1964. Elle s’exilera par la suite en Algérie puis en 1975 à Paris. Ses périodes d’exil en France seront très dures moralement et psychologiquement. Elle rentre au Maroc après le discours d’amnistie de 1994 où elle mourra.
Tahra Bent Naïme était parmi les camarades de Ahmed Agouliz, Cheikh El Arab, assassiné par Oufkir en 1964 à Casablanca. Elle sera torturée et condamnée à 5 ans de réclusion en Avril 1967 après 3 ans de détention provisoire…
Suite au événement de Mars 1973 lors desquels seront assassinés plusieurs militants dont Mahmoud Bennouna, un grand nombre de militants seront arrêtés et, pour 16 d’entre eux exécutés le 1er Novembre 1973. Parmi les détenus plusieurs femmes dont :
- Fatma Zayane, incarcérée alors qu’elle était enceinte : elle perdra son bébé suite aux tortures affligées
- Aïcha Massbah torturée et condamnée à 3 ans et demi de prison
- Itto Ameziane [4]
Izghar Zohra, arrêtée en 1973. Incarcérée au commissariat de Derb Moulay Chrif, torturée pendant de nombreux jours sera condamnée en Juillet 1976 à 1 an de prison.
Mme Baadi Zeid sera torturée et mourra sous la torture à la ferme de Tadla, suite à l’arrestation de 33 militants en majorité des paysans originaires de la région de Beni Mellal en 1976
En Février 1977, en pleine campagne électorale, arrestation de 13 militants dont 5 militantes. Elles seront condamnées à 2 ans de prison ferme pour « distribution de tracts »
En Mars 1976, 3 militantes seront présentées au juge . Elles ont été arrêtées en 74 et 75 et ont été condamnées à 5 ans de prison ferme en Mai 1976
Ftouh Rabia, née en 1956 à Tanger condamnée à 5 ans de réclusion.
Okacha Fatima, née en 1949 à Marrakech, ingénieur à l’ONE à Casa condamnée à 5 ans de réclusion.
Menbehi Saïda, née en 1952, professeur à Rabat condamnée à 5 ans de réclusion.
4 autres militantes seront présentées au procès après avoir été torturées.
Avant et après leurs procès et à l’instar de leurs camarades masculins, ces militantes ont mené plusieurs grèves de la faim pour protester contre leur condition de détention. Les familles malgré les pressions et les brimades étaient constamment mobilisées pour appuyer leurs revendications.
A l’issue d’une des grèves de la faim, Saïda mourra à l’hôpital le 12 décembre 1977 par manque de soins.
Fatna Mansar a participé aux luttes anti-coloniales, mais aussi néocoloniales pour le respect des droits humains et des libertés fondamentales. Elle découvre Derb Moulay Chrif centre de détention et de torture.
Comme elle, Fatna el-Bouih découvre au quotidien les traitements dégradants qu’on réserve spécifiquement aux détenues femmes qui continuent à participer dans les luttes nationales. Dans le but de leur briser leur identité de femmes, on leur donnera des prénoms d’hommes. En 2002, Fatna Elbouih publie un livre intitulé « Une femme nommée Rachid »
Femmes résistantes et combattantes pour l’indépendance de leurs pays, femmes détenues et parfois assassinées pour leurs idées, femmes exilées et séparées de tout lien familial…mais souvent femmes oubliées.
Il y a celles qui ont fait le même choix que leurs camarades masculins, mais aussi les victimes « collatérales », celles qui endurent des sacrifices par leurs liens avec leurs parents, leurs conjoints et enfants. Aujourd’hui, c’est aussi à elles que je rends hommage car elles se sont dépassées pour que jamais on ne puisse oublier…
Je pense aux femmes des exilés en Algérie que j’ai eu la fierté de rencontrer : Mme Fatima Elkhaddar, Mme Fatima Elmountassir, dit Si Amine, Mme Fatima Elhouarri qui a perdu son mari en exil et toutes les autres qui ont eu à subir l’exil parce qu’attachées aux convictions de leurs conjoints, qui ont éduqué leurs enfants dans un contexte d’exil.
Je pense aussi à toutes ces femmes¨, mères et conjointes des 16 camarades militants exécutés le 1er Novembre 1973, suite aux évènements de mars 1973 :
Mesdames Dahkoun, Moha Naït Berri, Barou, Idrissi, Bouchakouk, Aït Ami et bien d’autres… La famille Najar. Elles ont souvent vécu dans le dénuement….
A toutes celles qui, aujourd’hui encore et sûrement demain poursuivent sans relâche leur combat pour la Vérité sur le sort de leurs enfants ou conjoints, merci pour leurs présences.
- Mme Rouissi, morte en 2003 sans connaître la vérité et en ayant toujours espéré que son fils soit vivant. 13 mois après la fouille de ce qui serait sa tombe, Abdlhak n’a toujours pas été identifié…
- Mme Ababou qui vient de mourir sans savoir la vérité sur la disparition de son mari.
Et, bien sûr, Moui Fama, la mère de tous les militants, cette femme qui a connu toutes les crises internes du Mouvement Ittihadi et qui était toujours là pour soutenir les convictions infaillibles pour la vérité, l’égalité des droits et la dignité.
J’en oublie sûrement plusieurs mais les familles des anciens exilés et détenus, les familles des disparus écrivent la Mémoire du peuple marocain dans la souffrance, dans le déchirement, dans l’abnégation mais surtout dans la persévérance éternelle
Nous avons besoin de cette endurance pour que jamais le mépris l’emporte sur la dignité…Nous en avons d’autant plus besoin que les notions de démocratie et de vérité sont banalisées, instrumentalisées par le pouvoir avec, et cela est regrettable, la complicité de certains de ceux-la même qui ont connu prison et exil…
Le roi actuel a su, en se voulant le chantre des associations et fondations, instrumentaliser la question des droits humains. Mais avant lui, son père avait ouvert la voie à cette stratégie qui consistait à attirer certains militants pour faire croire que le Maroc avait changé ou plutôt que le pouvoir avait « la volonté politique « de changer…. Ceci, dans l’objectif de marginaliser les véritables défenseurs des droits humains…
La mise en place d’une Instance Equité et Réconciliation n’a pas empêché que des femmes et des hommes souffrent et soient torturés dans des centres de détention, que les fosses communes soient déplacées pour servir non pas une cause mais la stratégie du pouvoir : aucun respect des droits humains, les familles sont absentes.. On enterre les atrocités du PF3 car on n’y a rien remarqué d’anormal…, dixit le président de l’IER, actuel président du CCDH…
Le rapport de l’IER remis au roi en présence d’un parterre de personnalités reste muet sur d’innombrables questions mais a permis au roi de blanchir son père…
Et, en même temps, il y a de la continuité dans les exactions comme fut le cas de l’enlèvement en pleine nuit de Salah Souhaïli par intrusion dans le domicile des forces de l’ordre le 12 Février 2007 en agressant sa mère…
Ceci, au lendemain de la signature le 6 Février 2007 par le Maroc de la convention internationale contre les disparitions forcées.
Les familles, les mères qui ont porté pendant neuf mois tous ces enfants, les soeurs et je n’oublie pas bien sûr les pères et les frères, sont dans l’attente d’informations vraies mais on tente de les intimider en divulguant des informations confuses et contradictoires comme c’est le cas de Ouassouli. C’est une autre forme de répression, de torture et de mépris de la dignité humaine, héritée des années de plomb.
Mme Rhita Bennani Benbarka qui avait 30 ans à peine lorsqu’on enlève son mari et qui a connu 36 années d’exil car entre elle et Hassan II il y avait le cadavre de son mari …Faouz, sa fille et ses fils devront-ils faire avec le fait que cette affaire est franco-française…comme l’affirme l’IER ?
Mme Khadija Chaou, la mère de Houcine Elmanouzi passe de l’espoir au désespoir : on lui affirme que l’on aurait identifié leur fils et frère. On leur laisse espérer pour, en définitive, éluder le sujet…
La famille Ouazzane dont le fils a été enlevé suite aux événements de l’Atlas souffre de l’incertitude où on la laisse …
Les familles attendent toujours l’identification des leurs et se battent de manière permanente. C’est un combat que des femmes mènent pour la dignité et pour rompre le silence que leur oppose le CCDH à l’instar de celles que l’on appelait « les folles de la place de Mai »
Je ne veux pas conclure sur cette écriture au féminin de notre histoire, sans faire allusion aux combats menés par bien des femmes pour l’égalité des droits, pour le changement de la Moudawana et de ces mentalités dominantes que l’on inculque à nos enfants.
Pour exemple, dans un extrait du Manuel de Français des élèves marocains de la classe de 9ème (CE2), un extrait relatif à l’accord des adjectifs qualificatifs, on peut lire sous le titre: Les femmes de notre siècle
» Coléreuse, rancunière, noire de coeur,
Susceptible, orgueilleuse, prétentieuse,
Grondeuse, grommelleuse, grimacière,
Querelleuse, irascible, faiseuse de moue,
Boudeuse, jalouse, menace-mari […]
Elle ne croit pas aux châtiments et ne se voile pas.
Quand on commande, elle n’obéit pas,
Quand on la met en garde, elle ne change pas,
Quand on la conseille, elle n’accepte pas… ».
Hommage à ces femmes qui n’accepteront jamais de rester en dehors de cette histoire à laquelle elles ont toujours contribué et qui, dans différentes structures ou à titre individuel, participent au développement de notre pays en imposant un changement dans les mentalités malgré les vexations, les brimades et les agressions qu’elles subissent parfois.
A toutes ces femmes qui ont fait, font et continuent d’écrire notre histoire et surtout qui nous incitent à ne pas baisser les bras face à l’injustice, le non droit et le mépris des peuples.
Leur vigilance est exemplaire. Leur engagement désintéressé. Leur humilité est le plus bel exemple de dignité…
Terminons avec ces lignes de Saïda Menebhi écrites en prison en Novembre 1977, un mois avant son décès.
« Cette nuit n’est pas différente
N’est-ce pas, camarade ?
Les chiens de garde sont venus nombreux
Pour tout nous arracher
Et même les murs de la prison
Qui sont à eux
Ont été encore plus maussades
Les femmes ont pleuré
En cachette
Et nous avons gardé le sourire
Nous avons tenu bon
Et affronté les douleurs
Car nous savons
Qu’être en prison
N’est pas un problème
Il s’agit d’aller de l’avant. »
Hayat Berrada Bousta
31 mars 2007
[1] Voire « Les 30 glorieuses ou l’âge d’or du nationalisme marocain. 1925-1955 » Mhamed AOUAD et Maria AWAD. 2007
[2] voire « Les berbères dans l’histoire . De la Kahina à l’occupation turque. » T II GAID Mouloud. Ed Mimouni. 1990
[3] Idem note 1
[4] Voire le livre en arabe « Les femmes de l’Atlas –Témoignages- » Fatna El- Bouih et Youssef Madad. Ed Le Fennec. Février 2006